L’armée imaginaire. Et si on repensait l’histoire ? - Université Bordeaux Montaigne

Nouvelles publications

L’armée imaginaire. Et si on repensait l’histoire ?

Relief architectural dit autel de Domitius Ahenobarbus : scène de recensement avec un suovetaurile (détail) © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Hervé Lewandowski

La République romaine est-elle morte parce que ses légions auraient fini par être recrutées, pour l’essentiel, parmi les plus pauvres de ses citoyens ? François Cadiou, professeur d’histoire romaine (Ausonius UMR 5607 – Université Bordeaux Montaigne/CNRS), signe un ouvrage remarqué qui remet en cause cette théorie traditionnelle.

Un mythe historiographique


François Cadiou, professeur d’histoire romaine (Ausonius UMR 5607 – Université Bordeaux Montaigne/CNRS)
L’historiographie moderne a coutume d’attribuer à un déclin du niveau social du recrutement des légionnaires romains, une responsabilité décisive dans la crise et la chute de la res publica, au Ier s. av. J.-C.

Pour la première fois, ce livre démontre qu’un tel phénomène n’est absolument pas attesté dans la documentation, essentiellement littéraire, et réfute ainsi l’hypothèse de cette prétendue « prolétarisation » des légions.  

L’armée de citoyens pauvres qui en aurait été issue s’apparente donc, pour l’auteur, à une véritable armée imaginaire, source de nombreuses représentations fantasmées et erronées.

Prolétaire : citoyen non-possédant et, pour cette raison, inscrit en-dessous des cinq classes censitaires. Il était en principe exclu de la participation militaire. Il tenait cette dénomination du fait que sa seule richesse était les enfants qu'il pouvait procréer (proles)

Armée de conscription VS armée professionnalisée

Depuis le XVIIIe siècle au moins, l’historiographie associe l’idée d’une paupérisation croissante des légions romaines à une réforme de la conscription attribuée au consul Caius Marius en 107 av. J.-C.


Monnaie d’Antoine – Legio VIII, 32-31 avant J.-C. © www.marine-antique.net
Jusqu’alors l’armée romaine aurait été une armée de conscription recrutée parmi les citoyens fortunés. Le cens, institution fondamentale de la cité romaine, établissait la liste hiérarchisée des citoyens et de leurs biens. Celle-ci servait de base au recrutement dans l’armée romaine.

L’évolution du recrutement dans la légion à partir de la prétendue « réforme marienne » aurait permis d’avoir ensuite quasi-exclusivement recours à des volontaires appartenant aux couches les plus basses de la société. Le résultat de cet abaissement socio-économique serait la transformation d’une armée modèle, efficace et disciplinée en une armée professionnalisée dépourvue de tout idéal civique.

Remettre en cause les modèles établis

Selon François Cadiou, cette armée d’un nouveau genre n’a jamais existé que dans l’esprit des spécialistes modernes qui ont cru, par cette expression, pouvoir rendre compte d’une évolution significative en matière de recrutement légionnaire au cours du dernier siècle de la République.

Il démontre que, même au plus fort des guerres civiles, les légions restèrent majoritairement composées de conscrits et non de volontaires. Le critère censitaire ne fut jamais abrogé et le service dans la légion répondait toujours à un idéal civique inséparable d’une certaine idée de la masculinité.  

Les Belles Lettres
Soutenue en décembre 2013 à l’Université de Rouen, l’Habilitation à Diriger des Recherches de François Cadiou est publiée chez Les Belles Lettres qui proposent la plus importante bibliothèque au monde de textes classiques.

Plusieurs exemplaires de l'ouvrage sont disponibles dans vos bibliothèques.

Contact : Sonia Syllac - Chargée de valorisation, communication et médiation scientifique Institut Ausonius (UMR 5607 - CNRS/Université Bordeaux Montaigne).

footer-script