Juillet 05 - Thierry Vivier - Université Bordeaux Montaigne

HDR- Résistance et guerre à Tours et en Touraine. A l'ère des conflits de masse de 1870 à 1954 : de l'ago-histoire à l'histoire globale, un projet d'histoire multiscalaire

M. Thierry Vivier

 

Date: 05 juillet 2016 à 14h15
Lieu: Université Bordeaux Montaigne
Salle des Actes - Bâtiment Administration
Esplanade des Antilles
33600 Pessac

 

Après avoir été chercheur 1988 à 1993 au SHAA (Service Historique de l'Armée l'Air, château Vincennes) et après avoir soutenu une thèse de doctorat en 1994 à Paris I portant sur la préparation de la guerre aérienne de la France dans les années 1930 (La Politique aéronautique militaire de France de 1933 à 1933, thèse de doctorat éditée chez l'Harmattan en 1997), Thierry Vivier propose, dans le mémoire de son HDR, une réflexion d'ensemble sur le phénomène guerrier et la Résistance à partir de l'étude de cas de Tours et de la Touraine, qui présente l'intérêt au cours des trois conflits franco-allemands du premier vingtième siècle (1870-1871, 1914-1918, 1939-1945) d'être l'interface entre l'histoire locale et l'histoire nationale et internationale.
[En effet, au cours de ces trois confrontations, Tours a joué le rôle de centre névralgique de la France : capitale éphémère de la France en 1870 avec la venue de la Délégation gouvernementale dirigée par Léon Gambetta, puis en juin 1940 avec l'arrivée du gouvernement de Paul Reynaud, la cité tourangelle a failli l'être en 1914 avec le passage du gouvernement, première étape pour un repli pour Bordeaux, juste avant qu'il ne retourne à Paris après le sursaut de la bataille de la Marne au début du mois de septembre 1914. De plus, le chef-lieu de l'Indre-t-Loire, par sa position médiane en France et par sa fonction de noeud ferroviaire stratégique très important, a servi, en 1917-1918, de principale base logistique à l'Armée américaine. Par ailleurs, l'axe ligérien, lors des invasions allemandes de 1870-1871 et de 1940, a fait office de dernier ridau défensif avant les signatures des armistices franco-allemands. Depuis la Restauration (1815-1830) et la Monarchie de Juillet (1830-1848), il avait été prévu qu'en cas d'agression de l'hexagone, Tours et le Val de la Loire seraient utilisés comme première base de repli au gouvernement français, en cas d'évacuation nécessaire de la capitale avant Bordeaux, qui devait être la seconde et dernière étape de celui-ci.
A chaque fois, ce schéma stratégique de repli en deux étapes (Touraine, puis région Bordelaise) a été appliqué au cours des trois conflits. Toutefois, pendant la Grande Guerre, ce dispositif de retraite gouvernementale n'a pas été réalisé jusqu'au bout, en raison de la contre-offensive inattendue de Joffre sur la Marne. La présence de la Délégation gouvernementale à Tours, dirigée par Léon Gambetta, des Américains en 1917-1918 et du gouvernement Reynaud en juin 1940, a hissé la ville moyenne de province qu'était la cité tourangelle quelque peu assoupie, en capitale de la Défense nationale, mais aussi en capitale politique nationale et internationale, puisque presse, parlementaires, ambassades ont suivi les autorités gouvernementales. La cité tourangelle et la Touraine des Châteaux ont accueilli non seulement les instances dirigeantes de l'Etat mais aussi les sièges des principaux journaux parisiens et nombre d'ambassades, ainsi que de nombreux combattants provenant d'horizons lointains pour aider la France envahie : ainsi républicains espagnols et chemises rouges italiennes menées par Garribaldi en 1870 sont venus à Tours épauler la République française ; en 1917-1918, les Américains sont arrivés à Tours pour combattre aux côtés de la "Grande Nation", en souvenir de l'alliance fraternelle nouée par la France de Louis XVI et du marquis de Lafayette en 1776-1783 avec les Insurgents. De surcroît, l'axe ligérien a été à plusieurs reprises un haut lieu de la "Résistance" française, incarnée en 1870 par les unités franc-tireurs de l'armée de la Loire et les réseaux de résistance du Val de Loire, qui ont été nombreux, en raison notamment de la proximité de la ligne de démarcation passant juste au Sud de la région tourangelle.]
L'intérêt d'une telle étude de cas sur Tours et la Touraine, réside dans le fait, de montrer, d'une part, le télescopage de l'histoire locale avec l'histoire nationale et globale, et d'autre part, de suggérer de nouvelles pistes de recherche, qui s'inscrivent dans un projet de recherche multiscalaire, proche de la géohistoire, prenant en compte la pluralité des temporalité, liées entre elles par des liens mémoriels intergénérationnels, et la diversité des échelles géographiques, sociales et culturelles... Finalement, c'est à la fois un projet de recherche d'histoire comparée des conflits et d'histoire multiscalaire des guerres, de la guerre, que propose le mémoire de HDR de Thierry Vivier. A ce souci de renouveau méthodologique s'ajoute un souci de renouveau épistémologique : comment l'historien, face à son propre cheminement, en recourant à "l'ego-histoire", à l'exemple de l'historien Pierre Nora, peut-il, procéder à des recherches historiques, qui le libèrent de sa propre subjectivité et tendent à une "certaine" objectivité marquée du sceau de la rationalité ?

 

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