Nov 18- Isabelle Bouchiba Fochesato - Université Bordeaux Montaigne

Habilitation à diriger des recherches- Isabelle Bouchiba Fochesato- Poétique de la dualité dans El condenado por desconfiado de Tirso de Molina

Isabelle Bouchiba Fochesato

 

Date: 18 novembre 2016 à 14h00
Lieu: Université Bordeaux Montaigne
Maison de la Recherche salle 001
Esplanade des Antilles
33600 Pessac

Le dossier de HDR se compose, outre un recueil d’articles portant presque tous sur le théâtre baroque espagnol et publiés entre 2006 et 2016 et de la thèse soutenue en 2006, d’une monographie inédite et d’une synthèse des travaux.

La monographie, intitulée « Poétique de la dualité dans El condenado por desconfiado de Tirso de Molina » est consacrée à une pièce unique attribuée à Tirso de Molina (1583 – 1648), un des maîtres du théâtre baroque espagnol avec Lope de Vega (1562 – 1635) et Calderón de la Barca (1600 – 1681). Il s’agit d’un drame théologique mettant en présence deux personnages que tout oppose puisque l’un est un ermite et l’autre un spadassin napolitain et qui vont voir leur destin respectif s’inverser au cours de la pièce, l’ermite initialement promis au paradis finissant en enfer par orgueil et le spadassin, bien meilleurs que lui-même ne le croyait, au paradis. La pièce suscite depuis longtemps une lecture souvent polarisée dans la mesure où si les uns la considère comme une œuvre toute entière conçue pour défendre la notion de libre arbitre mise à mal par la Réforme mais également par certains courants de l’Eglise catholique, les autres y perçoivent une réflexion subtile sur le rapport au père, voire un questionnement pré-psychanalytique sur les modalité du choix.

La pièce apparaît comme marquée par la dualité (tout semble se dédoubler et/ou se redoubler : les personnages bien sûr, les mondes qu’ils représentent, érémitisme pour l’un rufianerie pour l’autre, mais aussi les espaces et les temporalités). L’objet de la monographie inédite consiste à démontrer que cette dualité, si elle ne peut être niée ne constitue en réalité qu’une sorte de structure superficielle, une première strate de réception abordant, plus que la question du libre arbitre, celle de la Grâce, alors que, pour peu que l’on accepte de plonger au cœur du texte dramatique, se dégage peu à peu une grande unité esthétique (et donc éthique) qui fait du seul personnage de l’ermite damné le vrai personnage de l’œuvre. De fait, cet ermite, nommé Paul s’emploie, dans sa quête de perfection érémitique d’abord, dans sa révolte contre Dieu ensuite, à faire le chemin de Damas à l’envers, refusant l’élan du cœur au seul bénéfice de la puissance de l’esprit et retournant par la même au sources du pharisianisme.

La question du choix du nom de l’apôtre pour un personnage de damné fait également l’objet d’une analyse dans la mesure où tout le théâtre de Tirso de Molina est traversé et travaillé de manière subliminale par l’injonction paulinienne à « tuer le vieil homme ».

En démontrant la profonde unité structurelle de la pièce, l’étude cherche également à démontrer l’unité de l’ensemble du théâtre de Tirso de Molina encore très souvent présenté comme polarisé entre pièces profanes (dont la plus célèbre et la plus débridée est sans aucun doute Don Gil aux chausses vertes/Don Gil de las calzas verdes) et pièces religieuses.

La synthèse des travaux opère une mise en perspective et une analyse critique des articles publiés entre 2006 et 2016 et, tout en proposant parfois une réorientation a posteriori, fait le constat de l’émergence du motif biblique au fil de ces analyses au point qu’il nous apparaît désormais que la Bible constitue une véritable superstructure du théâtre tirsien. 

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