Juin 3 - Pascaline Bablee - Université Bordeaux Montaigne

La déconstruction de l'exotisme insulaire dans la littérature indianocéanique

Doctorante: Pascaline Bablee

 

Lieu: Université Bordeaux Montaigne
Salle des thèses- Bâtiment Accueil 2ème étage
Esplanade des Antilles
33600 Pessac

 

Résumé

La déconstruction de l’exotisme insulaire
dans la littérature indianocéanique

La littérature de l’océan Indien représente un champ prolifique et évolutif, comme l’attestent plusieurs travaux publiés ces dernières années. Ces recherches s’accordent souvent à mettre en exergue, chez un petit nombre d’écrivains-phares, une esthétique récurrente dans l’écriture de la seconde génération d’écrivains indianocéaniens, substituant à la vision exotique édénique une vision insulaire cauchemardesque. Dans notre étude, nous reprenons systématiquement le questionnement sur ce processus de déconstruction et proposons des réponses, en restant au plus près des ouvrages d’un corpus que nous avons conçu comme le plus large et le plus représentatif possible. Pour ce faire, il fallait souligner les éléments majeurs rassemblant les littératures malgache, réunionnaise et mauricienne, dans leurs grandes langues d’expression que sont le français, l’anglais et le créole.
Notre démarche comparatiste reprend donc à la base l’étude des grands traits constitutifs de la littérature coloniale qui ont contribué à l’élaboration d’une imagerie merveilleuse de l’île. Les textes essentiels de notre corpus, situés dans des périodes charnières, témoignent en effet d’un engouement certain pour le topos insulaire, révélateur de projections idéologiques et fantasmatiques.
Partant de quelques productions britanniques et françaises fondatrices (œuvres de Thomas More ; Daniel Defoë ; Robert Louis Stevenson ; Bernardin de Saint-Pierre ; George Sand ; Alexandre Dumas…), notre recherche s’oriente ensuite vers des productions coloniales de l’océan Indien même, où la pastorale insulaire ne fléchit pas, bien qu’elle soit déjà plus nuancée (chez des auteurs comme Arthur Martial, Clément Charoux …)
Notre étude s’attache ensuite à l’étude d’une littérature de première génération propre au bassin indianocéanique, où des expressions postcoloniales émergent sans que disparaissent toutes les idéologies coloniales pour autant (œuvres de Jean-Joseph Rabearivelo, Malcolm de Chazal, Loys Masson, Marcel Cabon, Marcelle Lagesse ; …).
Cette littérature de l’entre-deux prépare graduellement une seconde génération d’écrivains pour qui le renversement des présupposés coloniaux est une visée bien plus déterminée (ce sont les références les plus nombreuses de notre corpus : Marie-Thérèse Humbert ; Axel Gauvin ; Ananda Devi ; Nathacha Appanah ; Shenaz Patel ; Barlen Pyamootoo ; Dev Virahsawmy ; Khal Torabully ; Raharimanana ; Carl de Souza, Amal Sewtohul…)
Ainsi, en prenant appui sur les théories, mouvements et concepts postcoloniaux tels que l’Exotisme, l’Insularité, la Créolité et la Littérature-Monde, nous questionnons et analysons les stratégies scripturales mises en avant par les auteurs indianocéaniques contemporains. Que signifie leur approche déconstructrice de l’imagerie insulaire ? En quoi est-elle une revendication identitaire, linguistique, géographique et historique ? Se contentent-ils de saper les archétypes coloniaux dans un contre-discours vindicatif ? N’élaborent-ils plutôt une poétique postcoloniale complexe et apte à favoriser l’appropriation de leur univers ? Ne cherchent-ils pas à exprimer parallèlement le désir de s’ouvrir au monde au travers d’une pensée dynamique de l’identité insulaire ?
Ce sont autant de questionnements montrant au final l’évolution constante de cette production littéraire, et chez les écrivains actuels, le rejet des schématisations réductrices au profit de la représentation d’une insularité beaucoup plus conforme à la réalité contemporaine indianocéanique, très éloignée de la scénarisation de la littérature coloniale.

 

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