Sept 23 - Said Ali Said Ahmed - Université Bordeaux Montaigne

L'archipel des Comores: milieu insulaire et géopolitique

Doctorant: Said Ali Said Ahmed

Date: 23 septembre 2015
horaires: 14h30
Lieu: Université Bordeaux Montaigne- Maison des Suds-amphithéâtre
Domaine universitaire- Esplanade des Antilles 33607 Pessac cedex

Résumé

La nébuleuse d’îles et archipels dispersés dans les mers et océans de notre planète, forme le monde insulaire. Caractérisés par une diversité géomorphologique et géopolitique, les îles et archipels du monde, ont en commun une forte prédisposition à l’instabilité physique et politique du territoire
Les îles n’ont jamais cessé de susciter une curiosité multiforme (culturelle, naturelle, sociale, scientifique et politique). Du mythe à la réalité, l’insularité nourrit et a toujours nourri l’imaginaire collectif. L’insularité est un milieu fort contrasté à la fois marginal et original, mais marqué également par l’altérité terre-mer. Les îles formant une même entité politique ou culturelle ont tendance pour la plupart à osciller par moment entre indépendance et intégration. C’est ce que (Chauprade, 2007) qualifie de « Logique d’archipel contre logique insulaire ». Cette dialectique constante fait à la fois la singularité et la complexité d’un monde insulaire marqué par une faible viabilité géopolitique d’où l’intérêt scientifique de notre objet d’étude.

L’insularité a toujours fasciné et fait l’objet de nombreux champs d’étude scientifiques. Cette thèse traite l’insularité comorienne sous l’angle de la géographie politique en tenant compte des apports théoriques et empiriques des autres disciplines. De l’époque précoloniale à la colonisation à l’indépendance et jusqu’à nos jours, les rivalités de pouvoir sur l’espace comorien rythment et ont toujours rythmé la vie politique de la nation comorienne pourtant cimentée par une seule et unique identité culturelle. Pour tenter de comprendre les ressorts de la conflictualité comorienne et appréhender les équilibres territoriaux ce travail vise à étudier la complexité géographique et le creuset identitaire et historique.

Centrée sur les causes endogènes et exogènes de cet écartèlement politique, notre étude tend également à dévoiler les réalités géopolitiques de l’archipel des Comores. L’insularité serait-elle un milieu à forte propension à l’instabilité et à la fragmentation politique ? Comment maintenir l’ensemble comorien dans une cohésion politique tout en reconnaissant à chaque entité composite une autonomie réelle ? Les Comores n’ont jamais cessé de vaciller entre division et unité politique. Quel système politique serait-il adéquat à la configuration géographique des Comores, capable de contenir les forces centrifuges ? Ces interrogations essentielles constituent la trame de notre travail de recherche.
L’archipel des Comores, autrefois désigné en lettres arabes (لقمر جزر) « les îles de la lune », se situées au sud-ouest de l’océan Indien au niveau du 45ème méridien d’une longitude de 46° E et d’une latitude de 19° 0 S et au-dessous de l’Equateur entre le 12ème et 13ème parallèles. Cet archipel se trouve au sud de l’océan Indien, entre les côtes mozambicaines qui les séparent à égale distance de 300k et 300k au Nord-ouest de Madagascar. Composé de quatre îles principales, (Mayotte (Mahorais) Anjouan (Ndzouani) Mohéli (Mwali) et Grande Comore (Ngazidja)) l’archipel des Comores forme un ensemble insulaire reliant l’est de l’Afrique et la péninsule indienne.

La balkanisation amorcée depuis l’indépendance avec l’antécédent de Mayotte tend à se généraliser sur l’ensemble du territoire comorien. Ainsi la déchirure politique de la nation comorienne trouve ses ressorts dans le creuset historique. Mais la configuration géographique du territoire en l’occurrence la multi-insularité facilite l’expression des tendances centrifuges. En effet les régimes politiques qui se sont succédé au pouvoir depuis 1975 n’ont fait en réalité que retarder l’éclatement en surface des forces centrifuges. Face au défi de stabiliser un territoire en proie à un séparatisme ambiant l’Etat comorien a pu mobiliser la communauté internationale pour tenter de réconcilier la nation et instaurer un nouveau mode de gouvernance politique qui puisse garantir les équilibres du pouvoir entre les îles. Mais l’instabilité politique guette encore ce pays

Par ailleurs l’implication de la communauté internationale dans la crise comorienne est d’un paradoxe inhérent à son rôle du gendarme du monde. Car, entre assistance et ingérence, elle vacille pour sécréter la paix nationale. Néanmoins, l’implication de la communauté internationale dans la résolution des crises comoriennes avait fortement contribué à contenir l’entité comorienne dans sa cohésion géopolitique. À l’issue du consensus national, une nouvelle forme de régulation institutionnelle a permis d’ajuster la gouvernance politique. Mais un certain nombre d’aléas politiques menacent d’ébranler l’édifice de la nouvelle fédération comorienne.Cependant, des incertitudes demeurent quant à la viabilité du système fédéral en vigueur. La difficulté pour l’État multi-insulaire de couvrir l’intégrité du territoire national est appréhendée comme un aléa politique, qui risque de compromettre l’unité nationale. Le délitement politique des composantes insulaires de l’Union des Comores montre la fragilité de la territorialité comorienne. En effet, au cœur de la construction géopolitique comorienne se pose avec acuité la question de l’identité politique, chaînon manquant du processus du nationalisme comorien.

 

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