Intervenant : Alain Mons
Horaires :15h30-17h30 Lieu : MLR033
Le cours aura pour objectif d’interroger la pertinence de la catégorie du vertige pour une compréhension singulière de notre monde. Pour cela on traversera plusieurs domaines et pratiques qui engendrent des phénomènes d’instabilité et de multiplicité, involontairement ou intentionnellement, selon une perspective résolument transdisciplinaire et aspectuelle.
On partira du texte de R.Caillois sur le vertige dans « Les jeux et les hommes » comme base anthropologique, pour élargir ensuite à d’autres expériences qui semblent particulièrement probantes. Les phénomènes de transe et de possession que les anthropologues ont étudiés comme des exorcismes d’un étourdissement propre au sacré (R.Bastide). Aujourd’hui à travers les installations et la chorégraphie, les artistes contemporains nous entrainent vers des instabilités et des troubles qui remettent en cause un équilibre acquis, afin de retrouver un corps autre, une vision différente du réel. Des créations visuelles font chavirer notre perception (vidéo, cinema) participant de ce symptôme d’une sorte d’égarement dans l’infiniment grand ou petit, de métamorphoses des échelles.
Il s’agit aussi d’appréhender le vertige des mondes dans lesquels nous évoluons assez dangereusement, avec la question des limites pulvérisées de nos environnements. Ainsi les hyper-villes qui démultiplient leurs dimensions dans une mise en abime d’elle-même à travers des architectures miroitantes, des surfaces spéculaires (W.Benjamin, M.Lussaut) ou un urbanisme chaotique. Cela va de pair avec la complexité d’une mondialisation capitaliste paradoxale aboutissant à une économie imprévisible, extrêmement fluide, et quasi monstrueuse dans ses effets pouvant détruire l’écologie de notre planète (ce que les philosophes J.Baudrillard, P.Sloterdjik, ou G.Deleuze, ont analysé à leur façon) . Les mondes numériques et du virtuel nous plongent subjectivement dans des chavirements de soi, comme avatars, ou bien dans l’alternance des disparitions et des réapparitions des présences humaines.
Parallèlement l’astrophysique moderne démontre l’existence des multilvers, d’univers parallèles invisibles dans un cosmos infiniment vertigineux, insaisissable, matière noire ou pliée, comme dans certains textes de vulgarisation de M.Cassé, ou JP.Luminet. La littérature en elle-même est travaillée par la force du vertige, comme avec des récits de D.Delillo, de V.Woolf, M.Duras, entre autres auteurs, au seuil des possibles, au bord de la folie, ouverture sur l’inconnu du sujet ontologique (F.Gachoud, V.Jankelevitch). Les « pathologies » du vertige sont d’ailleurs monnaie courante aujourd’hui, avec les drogues, et autres ivresses sexuelles.
Le cours a pour but de tenter une mise en perspective de tous ces paramètres, dans tous ces domaines, il s’agit d’interroger la notion de vertige et ses effets existentiels de façon phénoménologique, anthropologique et esthétique.