organisé par Emmanuelle Tron
Lundi 4 mars 2019, de 14h00 à 17h00, MLR001
Cette initiative doctorante prendra la forme d’une journée d’étude regroupant des doctorant(e)s venant de divers horizons de recherche, afin de penser ensemble le rapport qu’entretient le travail de chercheur à la vérité. Le format retenu sera celui de deux tables rondes (une le matin, une l’après-midi), avec quatre intervenants par demi-journée, qui proposeront chacun une intervention d’une demi-heure avant de débattre avec les autres participants à la table ronde et le public.
Deux grandes lignes se dessinent a priori : d’une part, le rapport à la vérité et la définition même que l’on donne de la « vérité » ne s’entendront pas de la même manière selon que l’on travaille à partir d’archives, tel l’historien, à partir de textes qui eux-mêmes s’emploient à mettre au jour une certaine vérité, tel le philosophe, à partir d’œuvres de fiction, qui ne cessent de remettre en question la notion de vérité, tel le spécialiste de littérature ou de cinéma, etc.
A cette plurivocité propre à un concept qui n’a de cesse d’être mobilisé pour rendre compte de différents biais de recherche, s’ajoute le contexte dans lequel ces recherches s’élaborent. Il est en effet courant d’entendre aujourd’hui parler d’ « ère de la post-vérité », syntagme qui prend sa source dans la mutation des rapports entre la sphère politique et la sphère des médias du fait du développement de l’Internet, et en particulier des réseaux sociaux. Ce néologisme, « post-vérité », apparu aux Etats-Unis au début des années 2000, désigne d’abord une culture dans laquelle les leaders politiques deviennent des leaders d’opinion, en ciblant dans leurs discours non plus la rationalité des citoyens, mais leur sensibilité, en usant d’éléments de langage appropriés. Cette mutation des rapports gouvernants/gouvernés va de pair avec une mutation du rapport de la connaissance au fait. Si certains sociologues contemporains vont jusqu’à diagnostiquer une « indifférence aux faits », il semble plus mesuré de soutenir que l’accélération de la diffusion de l’information adjointe au « gouvernement de l’émotion » amplifie des phénomènes qui ont en réalité toujours existé : « fake news », rumeurs, théories plus ou moins avérées, voire théorie du complot. Aujourd’hui donc, il semble que la vérité se doive d’être sensationnelle ou de ne pas être. Nous mesurons ainsi le décalage entre ce qui se veut être un travail patient, attentif à l’intégrité intellectuelle, mettant en avant l’argumentation et la confrontation des différentes sources, entre le travail du chercheur donc, et l’époque dans laquelle ce travail s’élabore, qui a subordonné la recherche de la vérité à l’impact de l’émotion.
Les intervenants se confronteront ainsi à deux grandes questions, qu’il s’agira de penser conjointement :
1/ Quel rapport entretiennent-ils à l’idée de vérité dans leur travail de recherche ?
2/ Quel regard leur travail de recherche leur permet-il de poser sur la société de l’information, et quelle contribution entendent-ils apporter à une possible redéfinition du concept de vérité aujourd’hui ?