L'Afrique voit-elle vraiment la vie en roses ? - Université Bordeaux Montaigne

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L'Afrique voit-elle vraiment la vie en roses ?

Jeudi 30 mars 2017, Bernard Calas a réceptionné plus de 1000 roses multicolores à la Maison de la recherche, une expédition tout droit venue du Kenya. Produites sur la ferme « Red Land Roses » propriété d’Isabelle et Aldric Spindler, une famille d’origine bordelaise, les 1080 roses comptent 92 variétés différentes. Après avoir servi à éclairer une conférence qui leur est consacrée,  elles vont faire l'objet d'études phénotypiques et génétiques qui serviront à confirmer ou non certaines des hypothèses fondamentales du programme ANR RosesMonde. Ce programme a l’ambition de décrypter les mécanismes de la création et de l’innovation, en l’occurrence variétales.

Bernard Calas animera une conférence
Lundi 3 avril 2017 -17h30 - Athénée municipal - Place Saint Christoly - Bordeaux

Dans le cadre des Lundis de la géographie proposés par la Société de Géographie de Bordeaux

Lorsque vous savez que chaque variété de roses est brevetée et donne lieu pour son créateur à une redevance pour chaque tige produite, alors vous entrevoyez l’ampleur du marché et du lobby économique que représente le marché de la rose dans le monde. C’est le propos du programme de recherche RosesMonde, financé par l'ANR, que coordonne Bernard Calas géographe, spécialiste de l’Afrique, chercheur au LAM (Laboratoire des Afriques dans le Monde) et Blandine Veith, sociologue, chercheur au Ladyss du CNRS à Nanterre.

RosesMonde a débuté en 2015 et s’achèvera en 2020

Bernard Calas, pourquoi avoir choisi les roses comme « produit » de cette recherche ?


Bernard Calas et Léa Benoït, diplômé d'un master de géographie de l'Université Bordeaux Montaigne
"En fait l’objet de la recherche c’est la création et l’innovation. La rose ce n’est que l’entrée en fait. Cependant une entrée importante. L’objet lui-même m’a littéralement crevé les yeux, pendant de longues années, au cours de mes séjours au Kenya : les roses y font partie du paysage « local » puis un jour que je me demandais quelle pouvait être ma contribution originale à la recherche, cette évidence m’a sauté aux yeux, il y a une bonne dizaine d’années. Il fallait étudier les circuits de commercialisation, les processus de création et d’exploitation, les modes de consommation et les impacts, conséquences et effets générés à travers le monde. Un chiffre marquant : la rose coupée représente 600 Millions de $ de ressources d’exportation au Kenya, c’est un lobby économique puissant. Ça mérite bien un programme de recherche !"

Ainsi, derrière la frivolité apparente du bouquet de roses qui vient orner votre salon, se cachent des questions vraiment sérieuses sur le fonctionnement du capitalisme, dans le monde, sur les processus de sélection génétique, sur la création. Les chercheurs du programme RosesMonde se questionnent sur sa provenance d'Afrique, sur les impacts de sa production, les effets induits en terme de développement dans les pays du sud et ailleurs, sur les circuits de commercialisation, sur les retombées pour les créateurs de variétés de roses et sur l’éthique du créateur : argent, notoriété, esthétique ?

Le programme de recherche compte une vingtaine de chercheurs multidisciplinaires, géographes, sociologues, économistes, historiens, généticiens issus de 5 laboratoires français.

Parmi ces 5 laboratoires, le LAM (Les Afriques dans le Monde), UMR 5115 IEP-CNRS, laboratoire bordelais impliqué dans le programme, concentre ses recherches sur les lieux de la filière de la rose coupée, son fonctionnement, sa contribution à la création variétale et ses effets induits en Afrique et ailleurs dans le monde.

Parmi les lieux les foires horticoles, les salons, les serres de démonstration ou de production, les marchés aux fleurs, les aéroports, les marchés d’intérêt nationaux, les boutiques, les grossistes, etc…En fait la rose permet de faire une géographie économique et une anthropologie de la mondialisation.

Quatre géographes, enseignants-chercheurs de l’Université Bordeaux Montaigne sont investis sur le programme RosesMonde.

Ils travaillent en équipe, cependant chacun a un angle d’attaque plus spécifique :

  • Bernard Calas anime le programme RosesMonde et se concentre plus particulièrement sur les investissements horticoles en Afrique, les marchés émergents et le fonctionnement de la plate-forme hollandaise,
  • Olivier Ballesta travaille sur les circuits courts,
  • Lucie Démettre étudie la chaine logistique de la rose coupée depuis sa plantation jusqu’à sa commercialisation,
  • enfin, Sylvain Racaud, nouveau venu dans le programme, swahiliphone, travaille sur les effets induits en Afrique des salaires distribués aux ouvriers et ouvrières de la filière de la rose coupée.

La réussite du projet RosesMonde doit également beaucoup à la cellule d’appui aux projets de la direction de la recherche de l’Université Bordeaux Montaigne.

RosesMonde : 5 laboratoires et une 20aine de chercheurs impliqués

CERHIO
 Centre de Recherches Historiques de l’Ouest
GRANEM Groupe de Recherche ANgevin en Économie et Management
IRHS Institut de recherche en Horticulture et Semences, INRA Angers-Nantes
LADYSS laboratoire Dynamiques sociales et recomposition des espaces
LAM Les Afriques dans le Monde

RosesMonde
« Objets vivants de culture et de nature, les plantes ornementales sont entrées dans le domaine du patrimoine dans les années 1970-80. Redonnant valeur à des variétés tombées en désuétude, cette patrimonialisation se nourrit d’une critique esthétique de l’offre horticole et d’une critique de la marchandisation. L’originalité de la création dans ce secteur est son caractère hybride, à la fois création à vocation esthétique et obtention fondée sur des savoirs génétiques. RosesMonde s’intéresse à cette hybridité créative et à son intrication avec les logiques de patrimonialisation et de marchandisation du capitalisme esthétique, à travers un produit : la rose, au carrefour des industries culturelles et de l’agro-business. Comment la création variétale rosicole enregistre-t-elle la tension entre marchandisation et patrimonialisation, au cœur des dynamiques sociales et politiques actuelles ? »
Source : http://rosesmonde.hypotheses.org/le-projet

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